Un salarié sur trois en Grande-Bretagne et aux États-Unis aurait déjà démissionné car les valeurs de son entreprise ne s’alignaient pas sur les siennes. Cette tendance de fond, le « conscious quitting », vient d’être révélée dans une nouvelle étude alors qu’en France la jeunesse étudiante multiplie les tribunes pour appeler à bifurquer. « C’est une véritable bombe à retardement » pour les entreprises, prévient l’ancien PDG d’Unilever, Paul Polman.

C’est un cabinet de chasseurs de tête Grant Alexander, qui, avec l’institut Opinionway, met en évidence l’amplification de « la grande démission » dans une étude, qui paraît mercredi 4 janvier. Plus d’un dirigeant d’entreprise sur trois, 35% exactement, appréhende une hausse des démissions pour l’année à venir. Face à ce phénomène, ils veulent tout faire pour retenir leurs salariés.

Source : France Info

Après la Grande démission, le « quiet quitting », voici le « conscious quitting », la « démission consciente ».

« Tout PDG qui pense gagner la guerre des talents en offrant un peu plus d’argent, un peu plus de télétravail et un abonnement à la salle de sport sera déçu. L’ère de la démission consciente est en marche ». 

Cette phrase, signée Paul Polman, ancien PDG d’Unilever, est tiré du nouveau Net Positive Employee Barometer.

Ce rapport, justement commandé par l’ancien patron et auteur de « L’entreprise Net positive : un business qui nous veut du bien », dévoile les contours d’une nouvelle tendance : le « conscious quitting » autrement dit la « démission consciente ».Ce phénomène, qui touche particulièrement les jeunes, désigne le fait de démissionner de son entreprise car cette dernière ne correspond pas à nos valeurs, sociales ou environnementales par exemple. Selon l’étude menée par le cabinet Opinium auprès de 4 000 travailleurs – 2 000 Britanniques et 2 000 Américains – la moitié d’entre eux envisageraient de quitter leur employeur en raison de valeurs trop différentes. 33% déclarent d’ailleurs avoir déjà quitté leur entreprise pour cette raison.

Génération Z, la plus concernée 

« Nous vivons un moment sans précédent dans l’histoire humaine ; une période de « perma-crise », où les pandémies, la guerre, le réchauffement climatique, les troubles économiques et la division sociale menacent, à des degrés divers, notre stabilité et notre avenir », écrit Paul Polman. « Les jeunes employés craignent particulièrement pour le monde dont ils hériteront. Il ne faut pas s’étonner que beaucoup veuillent donner de leur temps et de leurs talents aux entreprises qui s’efforcent de faire partie de la solution. »

De fait, la jeune génération, la génération Z, est la plus sensible à cette tendance. De manière générale, 76% des Britanniques interrogés et 73% des Américains affirment que l’environnement est un des facteurs clé dans l’acceptation d’un poste. Ils portent quasiment le même engagement pour l’égalité salariale et l’égalité sociale. Un sondé sur trois déclare même être prêt à accepter une baisse de salaire pour rejoindre un employeur correspondant plus à ses valeurs. « Selon nos dernières recherches, plus de 20 millions de Britanniques envisagent de changer d’emploi en 2023, de nombreux employés ressentant les effets de l’incertitude économique, sociale et environnementale », explique dans Stylist Charlotte Davies, spécialiste des carrières chez Linkedin.

Un  préjudice pour les entreprises

En France, on observe une lame de fond qui traverse la jeunesse étudiante. À Sciences Po, Polytechnique, HEC, AgroParisTech… les jeunes appellent leurs futurs employeurs à bifurquer, quitte à les boycotter. Le collectif « Pour un réveil écologique », composé des futures élites intellectuelles, a lancé le mouvement fin 2018. Le but : repenser la relation avec les entreprises pour qu’elles prennent un virage répondant à l’urgence climatique. Reste que si ces mouvements sont très médiatiques, ils représentent une infime partie des rêves des étudiants, affirme Aurélie Robertet, directrice France d’Universum.

 

Si le critère environnemental n’est certes pas le facteur le plus important dans le choix des candidats, il reste un facteur de différenciation dans un univers très concurrentiel aujourd’hui. « C’est une véritable bombe à retardement : au fur et à mesure que ces jeunes générations s’empareront de l’économie, ce décalage sera de plus en plus préjudiciable aux entreprises qui ne parviendront pas à rattraper leur retard », pointe Paul Polman. L’ancien PDG d’Unilever conseille ainsi aux entreprises de mieux penser leur business model pour qu’il soit rentable, durable et responsable.

Cette tendance intervient après celle de la Grande démission, the Great Resignation, aux États-Unis, consistant à quitter son emploi du jour au lendemain. 38 millions d’Américains ont ainsi démissionné en 2021 dont 4,5 millions pour le seul mois de novembre 2021.

Source Marine Fabre Soundron